Le salarié, qui contracte une maladie dans un contexte professionnel, recherchera utilement à obtenir la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie.
A l’instar des accidents du travail (lire notre article « Comprendre les notions d’accident du travail et d’accident de trajet »), le salarié pourra obtenir une indemnisation forfaitaire.
Surtout, la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie facilitera la condamnation de l’employeur pour faute inexcusable.
S’il n’existe pas de définition légale de la maladie professionnelle, il est aujourd’hui possible, à partir des textes applicables et des décisions rendues par les tribunaux de fixer les contours de la notion.
Cet article pose les fondamentaux de la matière.
Pourquoi obtenir la reconnaissance du caractère professionnel d’une maladie ?
Le salarié qui contracte une maladie dans un contexte professionnel aura tout intérêt à obtenir la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie.
La victime d’une maladie professionnelle bénéficiera d’abord d’une indemnisation forfaitaire couvrant l’ensemble des frais médicaux engagés ainsi qu’une indemnisation financière en compensation de l’incapacité, temporaire ou permanente, de travailler.
En outre, si le salarié obtient la condamnation de son employeur pour faute inexcusable, il pourra bénéficier de la réparation intégrale de son préjudice et dépasser ainsi l’indemnisation forfaitaire obtenue par défaut.
Le principe de l’indemnisation forfaitaire
L’indemnisation du salarié souffrant d’une maladie professionnelle, limitée aux soins médicaux engagés et au versement d’une indemnisation financière, est forfaitaire.
Le principe du forfait exclut, par définition, une indemnisation intégrale du préjudice subi.
Cela ne signifie pas pour autant que le salarié est définitivement privé d’un droit à obtenir à réparation intégrale de son préjudice.
Il peut en effet obtenir la condamnation de son employeur pour faute inexcusable.
Lorsque le salarié obtient la condamnation de son employeur pour une telle faute, il bénéficie d’abord d’une majoration de sa rente AT/MP.
Surtout, il bénéficie de la possibilité d’obtenir des tribunaux la réparation des différents préjudices subis, que ceux-ci soient professionnels ou personnels.
Les maladies dues à l’amiante répondent à un dispositif législatif spécial. Le salarié dispose notamment de recours devant un fonds spécial, le FIVA (Fonds d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante), auprès duquel il pourra obtenir une réparation intégrale de son préjudice.
Quels frais médicaux sont pris en charge ?
Lorsque le caractère professionnel de la maladie est reconnu, le salarié bénéficie d’une prise en charge intégrale de ses frais médicaux.
Cela comprend d’abord les frais médicaux à proprement parler (hospitalisation, chirurgie, pharmacie etc.) ainsi que les frais des appareillages imposés par la maladie (frais de fourniture, de réparation et de renouvellement…).
Cela comprend également des frais de transports, ou encore des frais nécessités par la réadaptation (réinsertion professionnelle…).
Les enjeux financiers sont considérables.
Quelle indemnisation en cas d’incapacité temporaire de travailler ?
Lorsque le salarié est dans l’incapacité temporaire de travailler (arrêt de travail), que cette incapacité est prouvée par la production d’un arrêt de travail établi par un médecin, et qu’il est en mesure de prouver la perte de gains du fait de cet arrêt, il perçoit des indemnités journalières.
Le montant des indemnités journalières en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle est plus élevé que celui prévu pour les indemnités journalières versées en cas d’arrêt de travail pour maladie non professionnelle.
Il est ainsi de 60 % du salaire journalier de base pendant les 28 premiers jours d’arrêt de travail (avec un plafond de 205,84 € au 1er janvier 2021) et de 80 % de ce salaire à partir du 29e jour (avec un plafond de 274,46 € au 1er janvier 2021) avec revalorisation possible au-delà de 3 mois.
L’indemnisation journalière AT/MP intervient à partir de la reconnaissance du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie. En amont de cette reconnaissance, les indemnités journalières ne sont versées qu’au titre de l’assurance maladie. Il peut être procédé à une régularisation a posteriori.
Quelle indemnisation en cas d’incapacité permanente de travailler ?
Le salarié atteint d’une maladie professionnelle et reconnu comme étant dans l’incapacité permanente de travailler peut percevoir une indemnisation sous forme de capital ou de rente.
Les modalités d’indemnisation (rente ou capital) sont déterminées en fonction du taux d’incapacité reconnu.
Ainsi, un salarié disposant d’un taux d’incapacité reconnu inférieur à 10% bénéficiera d’une réparation sous forme de capital alors qu’au-delà de 10%, l’indemnisation sera sous forme de rente.
Le montant de l’indemnisation, qu’il s’agisse d’un capital ou d’une rente, est fonction de la rémunération du salarié.
La condamnation de l’employeur pour faute inexcusable
Le salarié pourra solliciter du Tribunal la condamnation de son employeur pour faute inexcusable et demander la réparation intégrale de son préjudice.
L’employeur est en effet tenu, par l’existence d’un contrat de travail, au respect d’une obligation de sécurité de ses salariés. Il s’agit d’une obligation de résultat.
Un salarié victime peut donc engager la responsabilité de son employeur qui n’aurait pas su prévenir efficacement les risques auxquels étaient exposés ses subordonnés.
La définition de la faute inexcusable a été précisée au terme de plusieurs arrêts de la Cour de cassation rendus en février 2002 à propos de salariés exposés à de l’amiante.
C’est ainsi que la faute inexcusable de l’employeur pourra être retenue à chaque fois que l’employeur avait conscience, ou aurait dû avoir conscience, du danger (1ère condition) et qu’il n’a pas pris les dispositions nécessaires pour assurer la sécurité et préserver la santé de ses salariés (2ème condition).
Ces deux conditions sont cumulatives. En pratique, les Tribunaux apprécient la première condition in abstracto ce qui rend la défense de l’employeur particulièrement difficile notamment lorsque la maladie du salarié résulte d’une affection consacrée par le Code la sécurité sociale (cf. infra).
Comment caractériser une maladie professionnelle ?
Lorsqu’un salarié est malade, quand peut-il se prévaloir d’une maladie professionnelle ?
Répondre à cette question amène à s’interroger sur les contours de la notion de maladie professionnelle, qui rappelons-le souffre de l’absence de définition légale.
Notion générale de maladie professionnelle
La maladie professionnelle se distingue d’abord de l’accident de travail en ce qu’elle ne résulte pas d’un ou plusieurs faits accidentels (lire notre article « Comprendre les notions d’accident du travail et d’accident de trajet »). Le lien de causalité entre la maladie est l’activité professionnelle est alors bien moins évident à établir d’autant plus que les effets de la maladie se manifestent souvent dans des temps éloignés du fait générateur.
En toute hypothèse, la maladie, pour être professionnelle, doit présenter un lien avec le contexte de travail. Elle résulte alors soit de l’exposition du salarié à un agent pathogène soit aux conditions de travail du salarié. Le cadre légal des maladies professionnelles est établi selon cette distinction.
Le cadre légal des maladies professionnelles
Le cadre légal des maladies professionnelles est posé aux article L461-1 et suivants du Code de la sécurité sociale.
La loi envisage d’abord la répartition des maladies professionnelles en fonction de la nature de l’affection. Elle distingue trois catégories d’affection. Deux d’entre elles sont en lien avec l’exposition du salarié à un agent pathogène et la troisième est en lien avec les conditions de travail du salarié.
Le Code de la sécurité sociale distingue pour les affections en lien avec un agent pathogène les manifestations morbides d’intoxications aiguës ou chroniques et les infections microbiennes.
S’ajoutent à celles-ci, les affections en lien avec les conditions de travail (dans le texte, des « affections présumées résulter d’une ambiance ou d’attitudes particulières nécessitées par l’exécution des travaux limitativement énumérés »).
La loi détermine ensuite, pour chaque catégorie d’affection, des types d’affection. L’amiante constitue par exemple un type d’affection rattaché à la catégorie des manifestations morbides d’intoxications aiguës ou chroniques.
La loi établit ensuite, sous forme de tableaux, par type d’affection, les maladies associées, les délais d’incubation ou d’exposition normalisés et les travaux accomplis par le salarié ayant pu causer la maladie.
Les trois cas dans lesquels un salarié peut obtenir la reconnaissance du caractère professionnel
C’est à partir de la clé de répartition des maladies sous forme de tableaux que la loi détermine trois cas dans lesquels la maladie d’un salarié peut être reconnue comme étant de nature professionnelle. Le régime juridique attaché à chacun de ces trois cas est bien entendu propre à chacun d’eux.
Cas n°1 : contracter une maladie listée par les textes dans le contexte et les conditions fixées
Il s’agit de la situation la plus simple pour obtenir la reconnaissance du caractère professionnelle d’une maladie.
Le salarié qui apporte la preuve qu’il est atteint d’une maladie inscrite dans l’un des tableaux, en lien avec un type d’affection listé, dans le délai d’incubation fixé et du fait de l’exécution de travaux également listés bénéficie d’une présomption d’imputation de sa maladie à son activité professionnelle.
L’employeur ou la caisse peuvent toujours apporter la preuve contraire.
Cas n°2 : contracter une maladie listée par les textes en dehors du contexte et des conditions fixées
Un salarié qui apporte la preuve d’une maladie inscrite au tableau en lien avec un type d’affection consacré par les textes mais qui ne remplit pas les conditions de délais et de travaux peut tout de même obtenir la qualification de maladie professionnelle.
Dans une telle hypothèse, les textes prévoient en effet qu’une telle maladie peut être reconnue d’origine professionnelle « lorsqu’il est établi qu’elle est directement causée par le travail habituel de la victime ».
Le lien de causalité sera apprécié par le Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles (CRRMP).
Cas n°3 : contracter une maladie non listée par les textes
Il est enfin possible, pour un salarié souffrant d’une maladie qui n’est pas visée par les textes (par exemple en lien avec un type d’affection non reconnu) d’obtenir la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie.
A cet effet, le CRRMP devra d’abord établir que la maladie dont souffre l’assuré est essentiellement et directement causée par son travail habituel.
L’assuré devra être reconnu dans l’incapacité permanente de travailler d’un taux au moins égal à 25 %. Les ayant-droits de l’assuré décédé pourront également s’en prévaloir.
Les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d’origine professionnelle. C’est ainsi que le burn-out, pathologie qui n’est pas listée dans l’un des tableaux, peut parfaitement être reconnu comme maladie professionnelle dès lors que les conditions prévues dans le cas n°3 sont réunies. Plusieurs décisions rendues par les Tribunaux ont d’ailleurs tranché en ce sens.
Vous êtes victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ? Vous êtes l’employeur d’un salarié déclarant avoir été victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ? Nous sommes là pour répondre à vos questions.
Nous intervenons en effet, au côté des employeurs et des salariés, dans le cadre de procédures en reconnaissance ou en contestation des AT / MP.